Histoire de L’Education Physique Sportive

I.  Quelques éléments sur l’histoire de l’institution scolaire

 

A propos de l’éducation physique, de l’école et de la société française

I.1 Brefs rappels de l’histoire sociale

I.2 Les différentes structures de l’école du XIXe siècle

I.3 Les deux écoles ou l’histoire de deux identités

 

II.          L’intégration scolaire de l’éducation physique (1869 – 1889)

 

II.1 Le corps dans l’école avant 1869

II.2 Les premières réformes

II.3 Du rapport Hillairet au décret du 3 février 1869

II.4 Les effets du décret du 3 février 1869

II.5 La loi du 27 janvier 1880

II.6 L’expérience des Bataillons Scolaires

II.7 Les sociétés de gymnastique

II.8 Méthodes et Manuels

II.9 Le temps des réformes

II.10 La naissance de l’Eclectisme en éducation physique

 

III.      Genèse et Enjeux de la Méthode Française (1900 – 1935)

 

III.1 La militarisation de la France ( 1900 – 1914)

III.2 Les conséquences de la Grande Guerre ( 1914 – 1918)

III.3 Sportifs et Militaires

III.4 Les Instructions Officielles du 20 juin 1923 (L. Bérard)

III.5 Le Règlement Général d’EP de 1925 : la Méthode Française

III.6 Des militaires aux médecins

 

IV. Du Front Populaire à la IV ème République (1936 – 1959)

 

IV.1 Le plan Dezarnaulds

IV.2 Le Brevet Sportif Populaire

IV.3 Le Bilan du Front Populaire

IV.4 La politique de Vichy

IV.5 La Libération et les IO de 1945

IV.6 La chute de la IV e République et les IO de 1959

 

V. La sportivisation de l’éducation physique (1960 – 1970)

 

V.1 Les raisons de la rupture

V.2 Les volontés politiques

V.3 Réactions et nouveaux projets

V.4 Les IO du 19 octobre 1967

V.5 Le temps des critiques

V.6 Les contradictions des années 1970

 

VI. Les années 1980 et l’échec scolaire

 

VI.1 Le retour de la Gauche au pouvoir

VI.2 La réintégration de l’EP au MEN et la pédagogie du « Canada-Dry »

 

 

Histoire

 

 

 

 

 

Il existe une différence sémantique pour définir l’éducation physique (EP), donc il y a 2 conceptions de l’éducation physique : étroite et large.

 

 

1) Au sens large : éducation du corps

 

A.RAUCH et G. VIGARELLO assimilent éducation physique à éducation corporelle. L’objet d’étude est le corps, la motricité. L’EP est utile pour combattre la maladie avant qu’elle n’apparaisse. Cela renvoie à la notion de santé et d’hygiène, en puisant dans la médecine et les sciences.

 

L’histoire de l’EP n’apparaît pas autrement au XVIIIe. Elle marque le passage de l’orthopédie à un souci d’éducation corporelle (donc c’est une forme d’EP).

L’EP contribue à l’aménagement des rythmes de vie.

 

 

2) Conception plus étroite (P. ARNAUD) :

 

C’est la conception actuelle et celle à laquelle on va s’intéresser. Elle considère l’EP comme discipline d’enseignement : « L’EP se définit dans, par et pour l’école, et il n’y a d’EP que scolaire ».

L’EP a été obligatoire à l’école (1869) avant que l’école soit obligatoire (1882). Mais l’EP a des difficultés pour exister à l’école.

 

 

I Quelques éléments sur l’Histoire de l’institution scolaire

 

I.1) Brefs rappels de l’histoire sociale

 

XIXe : c’est la période du Consulat, puis de l’Empire (dictature militaire). BONAPARTE veut consolider l’œuvre de la Révolution de 1789. L’école a une mission nationale et une fonction maximaliste. Les fondements démocratiques de l’école ne le sont pas en réalité : l’école est destinée aux bourgeois.

NAPOLEON justifiait l’intérêt de l’EP à l’école (début 1800). Il fait le découpage des académies.

1808 : des écoles privées se développent en France ( CAFEP pour enseigner dans les écoles privées).

 

1815 : chute du 1er Empire, puis 3 régimes politiques.

 

1815-1848 : Monarchie Constitutionnelle qui nie les droits du travailleur. Mais LOUIS-PHILIPPE tient compte des revendications des classes défavorisées.

 

1848 : 1ère République. Apparition du suffrage universel. Le 1er président de la République est LOUIS NAPOLEON BONAPARTE.

 

1852-1870 : à nouveau un Etat totalitaire avec le 2nd Empire.

L’EP pendant cette période prépare à la guerre avec des hommes et femmes forts, dans un souci économique car un homme fort est productif.

 

En 1870 : 2ème République.

GAMBETTA conteste l’annexion de l’Alsace-Lorraine à la Prusse.

THIERS, chef du gouvernement, opte pour un régime républicain.

 

 

Episode la commune : mouvement résistant parti de Paris contre la République.

En 1873, THIERS est remplacé par le général MAC MAHON.

La tuberculose est un fléau social fin 19e et l’EP a aidé au recul de cette maladie.

1905 : séparation de l’église et de l’Etat

 

 

 

I.2) Les différentes structures de l’école du XIXe siècle

 

Cf. poly « Organisation simplifiée de l’école héritée du XIXe ».

             « Les 2 écoles en France en 1880 »

 

 

a)  Pour les élèves de 6 à 13 ans

 

L’école devient obligatoire de 6 à 13 ans en 1882 par JULES FERRY. Elle devient aussi laïque (aucun signe religieux à l’école). Le 3ème principe de l’école est la gratuité.

 

L’école change peu jusqu’en 1940 :

-        Stabilité numérique

-        Stabilité culturelle : l’école publique pour les garçons et l’école privée aux filles.

-        Stabilité pédagogique : déterminée par les programmes, fixés par des IO.

 

 

 

A. PROST parle d’une école du peuple et d’une école des notables. L’école est différente selon les couches sociales :

 

¨   les moins élevées :

Ecole primaire jusqu’au certificat de fin d’études (CFE) non obligatoire. C’est l’instituteur qui décide des élèves qu’il présente au CFE.

En 1868, GREARD constitue des classes hiérarchiques dans l’école. L’enseignant vérifie sur un trimestre les acquis de l’élève de l’année précédente.

Les apprentissages primaires sont : écrire, lire, compter.

L’école primaire a un triple but : éducation du corps, intellectuelle et morale.

La « ligue française de l’enseignement » influence l’école du peuple.

 

J. MACE dit qu’il faut transmettre une culture scolaire, accessible au plus grand nombre. Il est le père de la démocratisation de l’école.

1887 : l’EP désigne l’action conduite par un enseignement sur le corps des élèves.

On distingue 2 grands types de contenus : les gyms et l’instruction militaire.

 

Création d’une structure annexe à l’école primaire : ce sont les cours complémentaires pour les étudiants en difficulté, et qui les amènent au BEPS.

 

L’élève issu de l’école du peuple, même s’il est excellent n’ira jamais en collège.

Ces 2 écoles vivent en vase clos : il n’y a pas de passerelles.

 

 

¨     les plus riches :

Lycées, collèges à partir de 6 ans. Dans ces écoles, il n’y a pas d’EP car elle n’est pas considérée comme fondamentale.

Ecole primaire + école secondaire = 80 % des élèves scolarisés.

Pour les riches (10 %),ils sont en collèges, lycées et le bac est alors une distinction sociale.

 

 

b)  Pour les élèves de plus de 13 ans

 

A partir de 13 ans, on bascule dans l’enseignement secondaire payant : les classes sociales défavorisées font des métiers manuels (apprenti) et il n’y a pas d’EP.  Il est très difficile d’envoyer ses enfants à l’école primaire supérieure pour les classes sociales défavorisées car il faut payer l’école et l’internat, donc création des bourses pour aider les élèves.

 

Les meilleurs de l’école primaire supérieure intègrent l’Ecole Normale, puis l’Ecole Normale Supérieure. Un élève brillant issu des classes défavorisées peut prétendre au mieux à un métier d’instituteur.

 

 

Conclusion

Le principe de l’égalité des chances n’est pas respecté, de par la structure de l’école. Le combat du XXe siècle sera que l’égalité existante sur le papier devienne réalité.

 

 

I.3) Les 2 écoles ou l’histoire de 2 identités

 

L’enjeu est de fusionner les 2 écoles pour une école laïque, unique, obligatoire.

Le Front Populaire tente de fusionner les 2 écoles avec Léon BLUM et Jean ZAY.

Celui-ci détermine l’enseignement secondaire gratuit et en 1936, il rend l’école obligatoire de 6 à 14 ans (mesure pour défendre le jeunesse).

 

CARCOPINO est le secrétaire général de PETAIN, dont le but est de conserver les 2 écoles. Il supprime la gratuité de l’enseignement secondaire et les enseignements de l’école primaire supérieure ne sont pas les mêmes que ceux du lycée (latin au lycée).

 

 

1947 : Plan LANGEVIN-WALLON pour plus de démocratie à l’école.

Ce plan sert de base à toutes les réformes d’aujourd’hui. On veut une école éducative qui forme l’individu dans sa totalité (physique, morale, intellectuelle).

Ce plan est une véritable révolution culturelle à l’époque.

 

Il existe 5 finalités à ce plan :

v    L’école doit former des citoyens d’une société démocratique

v    L’école doit transmettre un patrimoine culturel propre à un peuple.

v    L’école doit instruire chacun(e) autant et aussi loin qu’il est possible

v    L’école doit assurer une formation professionnelle

v    L’école doit contribuer à la recherche et assurer la production de connaissances nouvelles.

 

Ce plan a 2 principes :

ü     Principe de justice dans l’école

ü     Principe d’orientation (choix de l’élève aujourd’hui de son orientation depuis 1980)

 

 

1959 : création des CEG avec BERTHOIN

Il établit des cycles en collège :

-        6ème / 5ème : cycle d’observation pour une orientation (CAP: certificat aptitude pro.)

-        4ème / 3ème : cycle d’orientation vers le BEPC (brevet d’étude 1er cycle) qui est un passage obligé pour aller au lycée ou orientation vers le BEP (brevet d’études pro.)

 

1975 : vers un collège unique (réforme HABY).

C’est la première structure démocratique pour les 11-15 ans.

Il ne manque plus que la réforme des lycées aujourd’hui (qui n’est pas encore démocratique). C’est pourquoi les lycéens sont dans la rue aujourd’hui.

 

 

Pourquoi ce système dual (2 écoles) ?

Il satisfait à la fois la droite et la gauche car il est le fait d’un compromis.

LEGRAND (88) : « L’école est le reflet de la société ». Donc en EP, on enseigne ce qui se pratique dans la société.

 

 

II L’intégration scolaire de l’éducation physique (1869 - 1889)

 

Introduction

 

La défaite de Sedan (contre les Prussiens) en 1870 a été le catalyseur. Mais ce n’est pas l’origine exclusive, on trouve des origines avant. L'éducation physique a intégré l'école depuis 1869, ce processus a démarré avant la défaite de Sedan.

 

Les disciplines, les enseignements à l'école ont une utilité, une légitimité par leur relation avec la culture (légitimité culturelle).

 

1869 : intégration de l’EP à l’école

1er niveau : l’EP veut intégrer l’école publique. C’est le débat entre 1869 et 1880. On revendique l’utilité scolaire de l’EP.

2ème niveau : l’EP est dans le système et doit être reconnue comme partie intégrante de ce système. Mais l’EP est rejeté pour sa non-conformité aux autres valeurs.

 

O. GREARD (1868) : « L’école doit enseigner ce qui n’est pas permis d’ignorer ».

P. ARNAUD : L’EP ne répond pas, en 1870, à l’orthodoxie scolaire.

La présence de l'EP à l'école est due aux finalités (discours), aux horaires (2h / semaine), aux profs ainsi qu'aux installations. Tout ceci compose l'orthodoxie scolaire.

 

      Finalités de l'EPS :

1.    Développement organique et foncier.

2.    Accès à un domaine de la culture (culture sportive).

3.    Gestion de la vie physique.

 

 

Le professeur d'EPS réclame un programme, car sinon, il ne ressemble pas au prof de maths.

Conclusion : L’intégration a pour mission de définir l’identité.

 

 

II.1 Le corps dans l’école avant 1869

 

La place du corps est négligée ou absente avant 1869.

 

Mythe de la dégénérescence : On justifie l’éducation corporelle par la dégénérescence de l’individu, pour réduire la mortalité. On assimile l’homme à l’animal. L’église (qui a une grosse importance dans l’éducation à cette époque) refuse l’EP pour redresser le corps.

 

Jean VERDIER propose un enseignement d’EP pour la 1ère fois, pour rétablir les enfants victimes de difformités. Prof de maths et médecin, il justifie l’EP à l’école par sa contribution à la santé ( = absence de maladie) : c’est l’origine médicale de l’EP. Il est le précurseur de l’EP du XXe siècle.

 

Le terme « éducation physique » apparaît officiellement en 1762, par un médecin suisse = BALLEXSERD.

 

M. FOUCAULT : « L’éducation du corps contribue au contrôle de l’âme. L’espace et le mobilier scolaire interdisent toute liberté corporelle, sauf à la récréation. »

Question de l’espace vital à l’école : gestion du mobilier, de l’espace. L’école entasse les élèves, on assimile les lycées aux prisons. En 1869, on condamne cette gestion de l’école.

Les jésuites profitent de la récréation pour la re-création des élèves.

 

T. ARNOLD a bouleversé l’approche des jeux. On va essayer d'importer en France sa réforme.P. de COUBERTIN et P. GROUSSET vont essayer de donner plus de place à l'EP, plus d’autonomie et de liberté.

 

 

II.2 Les premières réformes ( 7 raisons )

 

·       Choix politique : L’école est le passage obligé de la jeunesse (loi du 25 mars 1882 qui rend l’école obligatoire de 6 à 13 ans), donc le noyau privilégié du contrôle de la jeunesse. Elle doit être le reflet de la société et le lieu d’éducation et d’instruction.

C’est le courant républicain.

 

·       Il revient à l’école de manière cyclique la nostalgie de la Grèce Antique.

 

·       Accroître la sécurité de l’élève. C’est une raison médicale : on prétend que l’EP permet de lutter contre le surmenage scolaire (les élèves se défoulent).

 

·       La gymnastique est considérée comme LE moyen pour lutter contre les dégénérescences (VIGARELLO) car la gymnastique développe la force.

 

   Ces 4 raisons ont en commun qu’elles définissent une utilité de l’EP.

 

·       Il existe des groupes de pression qui revendiquent l’utilité de cette EP : ce sont toutes les sociétés de gymnastique (l’USGF est celle qui s’engage le plus).

 

·       L’armée aimerait intervenir à l’école dès 6 ans pour former le corps des jeunes hommes car le service se fait à 21 ans.

 

·       Le courant des pédagogues défend l’EP à l’école, comme les autres enseignements.

 M. SPIVAK (1983) dit que l’on s’intéresse à l’EP parce qu’il y a eu convergence d’intérêts de différents acteurs :

    - médecins  : l’EP est essentielle pour la santé

    - militaires préparatistes : l’EP est une préparation médicale

       Général CHANZY : « faites-nous des hommes, nous en ferons des soldats ».

    - modernistes : pédagogues, sportifs... (HEBERT, DEMENAY...)

 

Le contexte au moment de ces réformes est scolaire et s’explique par l’engagement des hommes politiques. L’EP a des origines scolaires, avant des origines militaires.

 

 

L’EP sera acceptée, tolérée, reconnue grâce à l’œuvre des différents Ministres de l’Instruction Publique :

 

·       SALVANDY (1845) : il nomme officiellement le 21 octobre 1845 une commission qui a pour but «d’apprécier l’influence de la gymnastique dans les lycées et les collèges de Paris et de Versailles. » Le but est d’intégrer l’EP dans les écoles des notables, mais c’est un échec.

 

·       Cela débouche le 15 mars 1850 sur une loi qui propose l’enseignement de la gymnastique facultative dans les écoles primaires. Les communes prenant en charge cet enseignement, les plus riches ont des avantages sur les autres : il y a donc une grande disparité.

 

·       FORTOUL : il réunit une commission qui a pour but de déterminer les « exercices les plus propres à développer les forces des enfants et à leur assurer une bonne condition physique ». Il signe l’arrêté du 13 mars 1854 qui intègre la gymnastique dans les programmes des lycées, mais laisse l’initiative aux chefs d’établissement et aux collectivités territoriales. Cela dépend de la représentation de l’EP du chef d’établissement.

 

Pour rendre l’EP obligatoire, l’Etat va devoir mettre en place des moyens financiers et humains, et non plus se contenter de le dire.

 

 

II.3) Du rapport Hillairet au décret du 3 février 1869

 

MIP : Ministre de l’Instruction Publique :

Le 15 février 1868, V. DURUY nomme une commission qui a pour but d’inscrire l’EP dans les programmes scolaires et de présenter un programme méthodique (commission tripartite ( 3 administratifs, 3 militaires, 3 médecins) présidée par le Dr Hillairet).

 

Le ministre promulgue ensuite le décret du 3 février 1869, suite à la transmission du rapport HILLAIRET :

-        désormais, la gymnastique fait partie de l’enseignement dans les lycées et collèges.

-        Dans le primaire, la gymnastique dépend de l’appréciation des conseils municipaux, donc disparité selon les moyens des communes (on refait l’erreur de laisser l’initiative aux collectivités territoriales).

 

En lycées et collèges, l’EP est enseignée par des enseignants à part entière. Mais en primaire, ce sont des militaires ou des pompiers qui enseignent l’EP.

Pb : dans la pratique, les instituteurs ne sont pas formés alors soit ils font intervenir des personnes extérieures, soit ils ne font pas d’EP.

 

« La gymnastique de l’armée doit habituer à des exercices difficiles et même jusqu’à un certain point dangereux. Au contraire, dans les écoles, on devrait chercher à développer d’une manière normale et progressive le corps et en rétablir au besoin l’équilibre et l’harmonie.» (V. DURUY).

Les exercices sont mis en relation avec des niveaux de classe d’âges. Ils sont construits en progression, ce qui est relativement nouveau.

 

Le rapport HILLAIRET s’intéresse aux besoins en installations matérielles, c’est-à-dire aux matériels minimums pour que la gymnastique puisse fonctionner. Il établit un état des lieux des moyens matériels :

-        82 lycées, dont 67 qui possèdent appareils et agrès de gym et 42 gymnases

-        254 collèges, dont 90 qui possèdent appareils de gym et 22 gymnases

-        78 écoles normales, dont 29 qui possèdent appareils de gym et 6 gymnases

Ce même décret met en place les conditions suffisantes pour que les maîtres de gymnastique recrutés aient une qualification suffisante.

 

Le décret du 3 février 1869 crée le 1er diplôme qui permet d’enseigner l’EP : le CAEG (certificat d’aptitude d’enseignement à la gymnastique).

Toutefois, les gens déjà en place ne sont pas obligés de passer le CAEG. Les anciens militaires ont pour seule formation celle de Joinville, par AMOROS.

 

Durant 15 ans, 2876 CAEG seulement seront obtenus, et uniquement par des hommes.

L’armée freine l’arrivée des femmes et permet aussi à ses cadres de vivre l’enseignement de la gymnastique en limitant le nombre de CAEG décernés.

 

 

II.4) Les effets du décret du 3 février 1869

 

Ce décret a eu 2 effets :

 

a)     Des difficultés d’application :

 

La tension de 1869 entraîne des difficultés d’application. Ces difficultés sont étudiées par P. ARNAUD à Lyon, J. THIBAULT à Bordeaux, Y. LEZIART à Rennes.

 

On compte 4 difficultés d’application :

 

Ø     Ce décret va à l’encontre du conservatisme de l’Université : il oblige l’Etat à investir, construire des installations. Les locaux sont insuffisants en France à cette époque pour que le texte s’applique. Mais en priorité, il y une crise sanitaire de l’école c’est-à-dire insalubrité et insuffisance des locaux, donc il y a d’autres urgences.

 

Ø     L’instituteur refuse d’enseigner l’EP car il ne s’estime ni formé, ni compétent. Il réclame une rétribution complémentaire que l’Etat ne peut assurer. L‘établissement fait alors appel aux militaires, mais ils sont sous qualifiés.

 

Ø     L’organisation du temps scolaire : il ne faut pas perturber les disciplines classiques. Le décret prévoit 2h d’EP par semaine, mais elles sont découpées en plusieurs petits morceaux de cours répartis sur la semaine.

 

Ø     Liée au statut de la gym : le décret dit qu’il faut faire de l’EP mais il n’y a pas d’évaluation et les cours ne sont pas obligatoires (fort taux d’absentéisme). Dans certains lycées, les cours sont même payants (seul moyen de payer le prof.).

b)      La rupture culturelle :

 

Le décret du 3 février 1869 «ose» enfin revendiquer une place à l’école de l’EP, c’est une rupture avec la pensée culturelle. C’est la première fois qu’on accorde un statut social à l’EP.

Cette idée heurte les mentalités : au XIX° siècle, la place du corps n’est pas acquise.

 

Mais l’école met en place une gymnastique de type suédoise qui obéit plutôt aux contraintes de l’école qu’aux pratiques sociales du moment. La gym enseignée est austère, ennuyeuse, activité de dressage : cette éducation corporelle ne satisfait pas.

 

 

II.5) La loi du 27 janvier 1880

 

Les Républicains sont au pouvoir, nationalistes et ultra-nationalistes : l’EP a pour eux une place essentielle car ils veulent reprendre l’Alsace et la Lorraine (BOULANGER).

 

Jules FERRY (Ministre de l’Instruction publique depuis 1879) relance la question  de l’EP sur le plan politique et souhaite que la France prenne sa revanche sur la Prusse.

On retrouve F. BUISSON,  DEROULEDE et Jean MACE au sein de sociétés dont le poids est important sur l’Etat : la ligue de l’enseignement, la ligue des patriotes et même l’USGF.

Tout ce qui se fait à l’école dès 1880 est guidé par la notion de vengeance.

Une commission est créée qui réfléchit sur le rôle de l’école dans la III° République.

 

Sur le rapport St HILLAIRE, J. FERRY fait voter la loi du 27 janvier 1880 déposée par le député GEORGE. Elle « rend l’enseignement de la gymnastique obligatoire dans tous les établissements d’instruction publique de garçons dépendant de l’Etat, des départements et des communes ».

La gymnastique est obligatoire avant que l’école ne le devienne.

 

Pour rendre immédiatement l’EP obligatoire, le gouvernement républicain se tourne vers l’armée. Le militaire rentre à l’école pour y apprendre l’ordre, la discipline, le respect.

 

Le projet de 1880 est dans la continuité de ce qui a été fait, Sedan n’est qu’une étape :

-        Jules Ferry : EP obligatoire 1880

-        Ecole gratuite : 1881

-        Ecole obligatoire : 1882

 

Il existe 3 raisons qui expliquent le succès de cette loi, 3 finalités de la gymnastique :

ü     Hygiénique : souci de régénérer la race (lutte contre la tuberculose). Cela développe la santé.

ü     Economique : augmentation du rendement de chacun grâce à l’EP, donc utilité à l’économie de la nation. La loi du 28 mars 1882 rend l’école obligatoire de 6 à 13 ans, ce qui protège l’enfant d’une surexploitation trop tôt.

ü     Militaire : il faut préparer la revanche et assurer la transition entre l’école et l’armée.

Général CHANZY : « Faites-nous des hommes, nous en ferons des soldats. »

 

Les 3 groupes influants à cette époque sont les traditionalistes, les modernistes et les préparatistes.

C’est ce dernier groupe (l’armée), qui prend le pouvoir par 2 institutions :

-        Ecole de Joinville créée en 1882 (¹ du bataillon de Joinville)

-        Sociétés de gym

 

Les filles ne sont pas concernées par l’obligation de l’EP, car leur éducation est prise en charge par l’école catholique. La femme n’existe que pour la fonction de procréation.

 

Le Ministère de la Guerre demande en 1881 à l’école de Joinville de publier le « manuel d’exercices gymnastiques et militaires » pour appliquer la loi de 1880.

Il obtient le droit de la part du Ministère de l’Instruction Publique de distribuer des fusils à l’école  (circulaire du 22 octobre 1881) .

 

Ce modèle  d’une EP militaire est mis en pratique par la création des bataillons scolaires.

 

 

II.6 L’expérience des Bataillons Scolaires

 

Le contexte est favorable à la création des bataillons scolaires : montée des nationalistes (avec le général BOULANGER appelé aussi « général de la revanche ») qui veut reprendre l’Alsace-Lorraine par les armes. Il a le soutien de Jules FERRY.

 

Le 21 février 1882, P. BERT (qui remplace J.FERRY) nomme la Commission d’Education Militaire, dans laquelle F.BUISSON et P. DEROULEDE sont très influents, et qui se prononce sur une EP strictement militaire.

Cette Commission formule 2 vœux :

1)  Des exercices militaires doivent être enseignés ; l’école est l’antichambre de l’armée.

2)  Le maniement des armes doit être obligatoire.

 

Le décret du 6 juillet 1882, co-signé par le Ministre de la Guerre, de l’Instruction Publique et de l’Intérieur, ordonne la création des bataillons scolaires. L’école de Joinville est la première à l’organiser, par son directeur et responsable du Ministère de la Guerre BONNAL. Le bataillon scolaire fait l’unanimité dans le monde de la politique.

 

Un bataillon est une préparation militaire et morale (discipline, ordre, respect, don de soi à la patrie) tournée vers la nation et non vers l’individu. Il représente la fidélité aux idéaux de la 3ème République et illustre la domination de la société française par les sociétés bourgeoises.

 

·    Un bataillon scolaire ne peut être créé dans une école primaire que si elle regroupe plus de 200 élèves (garçons) de 12 ans minimum.

·    Il est dirigé par un gradé, désigné par l’autorité militaire. Pour la première fois, l’enfant est sous l’autorité de quelqu’un d’autre que l’instituteur. On enseigne particulièrement le tir à la carabine.

 

En 1885, la France compte 109 bataillons scolaires, dont un quart à Paris ; les autres sont surtout vers la frontière allemande. En 1886, ils connaissent leur apogée (146 bataillons).

En 1884-1885, on craint que le général BOULANGER renverse la République. Il s’installe une méfiance des républicains envers l’Armée ; cela entraîne une diminution des crédits pour les bataillons. En 1890, BOULANGER s’enfuit et en 1892, c’est la fin des bataillons scolaires. Ils auront connu le succès pendant 10 ans.

 

Mais l’idéologie demeure : les sociétés de gymnastique ont ensuite pour mission de combler le trou entre école et armée, de prendre le relais des bataillons scolaires.

 

 

II.7) Les sociétés de gymnastique

 

Les sociétés de gymnastique vont s’appeler les sociétés d’EP et de préparation militaire. Elles forment les soldats selon une idéologie patriotique nationaliste.

La notion de discipline résume les sociétés de gymnastique.

Les représentants de l’Etat font appel à l’USGF, société la plus influente, créée par E.PAZ en 1873, pour enseigner l’EP à l’école.

 

L’USGF va fédérer le maximum de sociétés de gymnastique : cela permet de mieux contrôler l’idéologie républicaine pour faire de tout jeune Français un citoyen républicain (obéissance, donne son corps pour la patrie). L’USGF est indépendant, car le Ministère de la Guerre va lui donner un agrément.

 

Dans ces sociétés, on apprend la gym, le tir, également à devenir un bon citoyen et on y enseigne que la performance individuelle participe à la performance de groupe.

P. ARNAUD les nomme «les sociétés conscriptives ».

L’uniforme est obligatoire, on y apprend des chants militaires.

 

Malgré la disparition des Bataillons, l’idéologie républicaine va s’imposer car elle va sortir de l’école pour embrasser toute la société.

 

 

II.8) Méthodes et manuels

 

C’est par l’intermédiaire de manuels que l’EP s’intègre à l’école : c’est la thèse de l’orthodoxie scolaire de P.ARNAUD.

 

Pour qu’une discipline scolaire soit reconnue, il faut qu’elle ait 3 caractéristiques :

-        inscription dans les programmes (EPS = oui depuis 1869 mais réellement en 1880)

-        une utilité reconnue ( pour l’EPS, militaire, hygiénique, économique)

-        une méthode d’enseignement

 

J. ULMANN : «  De la gym au sport moderne » :

Pour qu’une EP soit une méthode, il faut qu’elle réponde à 4 caractéristiques :

-        Une spécification des buts : toute action est finalisée.

-        Une détermination des principes (ex : progressivité au niveau de l’intensité)

-        Un ensemble d’exercices physiques

-        Précision des  conditions de mise en forme des exercices

 

Le Ministère de l’Instruction Publique fait preuve d’éclectisme :

Ø   Pour l’école primaire : EP très rigoureuse (discours militaire et médical)

Ø   Pour l’enseignement secondaire : EP plus souple. L’initiative est aux élèves, moins dirigée par le prof.

 

En 1881 est publié le « Manuel de Gymnastique et d’Education Militaire » pour les profs afin de contrôler l’Education Physique et le CAEG.

 

Le manuel est rédigé par le Ministère de la Guerre et entériné par le ministère de l’IP.

Paul BERT accepte donc qu’il soit appliqué à l’école. L’EP a un double but : fortifier le corps et donner des qualités d’adresse, d’agilité, de dextérité.

 

 

II.9) Le temps des réformes

 

a)     La crise de l’armée

 

A la fin du XIX°, il y a une crise de l’EP et de l’armée. La santé publique pose la question du surmenage à l’école (campagne des hygiénistes 1887-1892).

 

Les médecins nomment une commission qui a pour mission de réfléchir sur :

ü   Le surmenage scolaire (« gavage intellectuel ») : on travaille trop longtemps.

ü   Le mal-menage : reproche à l’école de ne pas adapter ses enseignements aux particularités de la jeunesse. Ex : mobilier scolaire.

 

Les médecins condamnent la conception militaire de l’EP.

RIANT en 1889 dans « Le surmenage intellectuel et les exercices physiques » parle de l’utilité médicale et sanitaire de l’EP pour vaincre le surmenage intellectuel. Il veut développer l’hygiénisme.

 

Il est à l’origine du rapport de l’académie de médecine, qui demande que l’éducation intellectuelle soit moins poussée.

ü   Réaménagement du temps scolaire : le temps consacré à l’éducation corporelle ne doit pas augmenter le surmenage des enfants.

ü   L’école doit s’ouvrir sur l’extérieur.

 

 

b)     Progrès des sciences

 

La naissance de la physiologie, fin XIX, va supplanter l’anatomie. Elle utilise le modèle thermo-dynamique de la machine à vapeur.

E. MAREY et G.DEMENY préconisent une fonction de l’EP qui développe les fonctions vitales de l’organisme (respiration, circulation). L’approche de l’EP est fonction> forme.

 

Conséquence : les scientifiques proposent une EP en plein air. Les intempéries ne sont pas un problème pour les scientifiques, ils disent même que plus le temps est mauvais, plus cela contribue à l’endurcissement du corps.

 

Cela donne naissance aux lendits (=concours d’EP réalisés en plein air). Les premiers ont lieu en 1889 par P.GROUSSET.

 

 

c)       Conclusion : les transformations de l’EP

 

Création en 1882 du 1er club : Racing club de France.

En 1887, les clubs se regroupent en lUSCP (Union Sportive des Coureurs à Pied) qui devient en 1889 l’USFSA (Union des Sociétés Françaises de Sport Athlétique).

Cette fédération organise les championnats scolaires.

 

Les médecins, sportifs, scientifiques et militaires revendiquent l’utilité de l’EP. Le gouvernement cède.

Le Ministre de l’IP, E.J.MARLEY, nomme une commission en 1887 dont le but est de « réviser les programmes relatifs à l’enseignement de la gymnastique ».

Elle rend un rapport rédigé par G.DEMENY, à l’origine de l’éclectisme en EP en France.

 

 

II.10) La naissance de l’éclectisme en EP

 

C’est la résultante d’un choix fait par le législateur (Ministère de l’IP).

L’éclectisme est une doctrine philosophique qui recommande d’emprunter aux divers systèmes les thèses les plus acceptables pour constituer un ensemble.

Le produit fini de l’éclectisme est le synthétisme, qui sous-entend une logique, une cohérence ; ou syncrétisme, qui est un amalgame.

 

Pour la première fois, l’EP va avoir une cohérence, un synthétisme rendu officiel en 1891 par un « manuel des exercices gymniques et de jeux scolaires ».

Ce manuel ouvre une période de 70 ans où l’éclectisme sera roi.

Remarque : l’éclectisme met 4 ans pour être accepté en EP.

 

 

On distingue 2 types de gym préconisés par la commission :

 

Ø   La gymnastique de développement : son enjeu est de développer la santé et les fonctions organiques. On y retrouve tous les exercices naturels, gymniques avec un accent sur la fonction respiratoire, le cœur et les poumons. C’est la GRAMMAIRE DU GESTE.

 

Ø   La gymnastique d’application :  c’est un enchaînement d’exercices qui peuvent se faire aux agrès + marches, courses, escrime, natation, sauts… Cette gymnastique prévoit des jeux, qui sont les ancêtres des sports.

 

 

·     Plus les enfants seront jeunes, plus on considère qu’ils ont besoin d’acquérir les bases, cela correspond plus à une gymnastique de développement.

·     Plus il est âgé, plus on considère qu’il a acquis les gestes fondamentaux, donc plus la gymnastique sera ludique.

III Genèse et enjeux de la méthode Française (1900-1935)

 

Introduction

 

L’enjeu est d’inscrire la France à la pointe du progrès social et politique en EP.

Il faut donc faire de la France le haut-lieu de l’EP.

 

Mais la France est en retard par rapport aux autres Nations (Allemagne, Angleterre et Suède) au niveau de l’EP. On crée donc une méthode française.

 

 

La France est en proie à plusieurs crises qui vont gêner l’évolution de l’EP en France.  Il existe 3 tensions :

 

v  La première tension est non spécifique à l’EP, mais à l’école. C’est la séparation entre l’Eglise et l’Etat (1905). Laïcs et religieux s’opposent, prennent l’EP en otage.

Les patronages laïcs, gérés par l’USFSA, et religieux, gérés par le FGSPF (fédération gymnique et sportive des patronages de France) sont créées et utilisent le sport comme un moyen de propagande et de recrutement de nouveaux adeptes.

 

v  La deuxième tension est une crise au sein de l’USFA concernant l’EP. COUBERTIN ne peut régler le conflit et quitte l’USFSA en 1896.

 

v  La troisième tension est d’ordre politique, car la France n’offre pas de stabilité. Les relations franco-allemandes gênent le développement de l’EP. Les militaires refusent l’éclectisme, car avant, ils avaient l’hégémonie.

 

 

III.1) La militarisation de la France (1907-1914)

 

Cela marque un retour en arrière. En 1907, il y a une relance de la croisade militaire car, en 1905, le gouvernement a décidé de réduire le service de 3 à 2 ans

En 1913, c’est le véritable retour de la militarisation  de la jeunesse, avec le service militaire remis à 3 ans.

 

Les militaires réclament et obtiennent la création dans les écoles des sociétés scolaires de tir. Cela rappelle les bataillons scolaires. Le MIP laisse l’armée gérer cet enseignement.

 

En 1905, le Ministère de la Guerre crée un diplôme, le BAM (Brevet d’Aptitudes Militaires). Celui-ci est intégré à l’école et l’évaluation correspond à l’obtention de ce diplôme.

 

 

III.2) Les conséquences de la grande Guerre (1914-1918)

 

Pendant la Guerre, l’EP à l’école n’existe pas.

 

Mais l’intégration de l’EP à l’école peut-elle se faire avec toutes les conséquences de la Grande Guerre ? Quels sont les bilans de la guerre ?

 

¨   Humain :

1,4 millions de morts et 3 millions de blessés.

39 millions d’habitants en 1918 avec un fort déficit de naissances (classes creuses).

 

¨   Géographique :

10 départements entièrement dévastés : nécessité de reconstruire.

 

¨   Economique :

La France n’a pas assez d’argent pour reconstruire. L’Allemagne, responsable de la Guerre, doit payer. La France occupe donc la Ruhr.

 

¨   Social :

La France est partagée entre ceux qui veulent encore le conflit et ceux qui n’en veulent plus.

Un nouvel état d’esprit apparaît dans la société à partir de 1919 : les profiteurs de guerre.

De plus, les femmes prennent leurs responsabilités et réclament l’égalité des droits, dont celui de disposer de leur corps. C’est l’émancipation de la femme.

 

 

Ø   Conséquences sur l’EP :

La France est partagée :

-      certains sont pour le changement et donc l’interdiction de l’instruction de l’EP militaire

-      les autres disent que la solution appliquée avant la guerre est la bonne, car la France a gagné la Guerre.

 

Les défenseurs d’une conception sportive de l’EP n’arrivent pas à s’imposer pour plusieurs raisons :

ü     C’est l’Assemblée Nationale, constituée majoritairement d’anciens soldats (poilus) qui décide d’une EP militaire. Mais cela n’est pas au goût de l’opinion publique qui pense que l’EP ne doit plus appartenir à l’armée.

ü       Il n’existe pas de méthode d’enseignement, donc des difficultés pour l’instaurer à l’école.

ü       Existence d’un mouvement critique important convergeant contre le sport. On dénonce la spécialisation, le surmenage, les dangers du sport pour la femme.

 

 

III.3) Sportifs et militaires (préparatistes et modernistes)

 

Une crise oppose :

·     un courant conservateur, militaire avec A.CHERON

·     au modernisme, sportif défendu par G.VIDAL qui veut que l’EP devienne sportive. Il  s’appuie sur l’extraordinaire développement du mouvement sportif au début des années 20.

En 1921, l’armée crée un sous-secrétariat de l’Etat au Ministère de la Guerre.

Pour combattre cette décision, VIDAL crée aussi un sous-secrétariat d’Etat au Ministère de l’Instruction Publique. L’EP est donc gérée par 2 Ministères et le gouvernement doit choisir : ce sera la solution moderniste.

 

Pourquoi ?

 

v  Une nouvelle génération d’hommes politiques apparaît (rupture culturelle).

v  Le sport a été testé dans les écoles. En politique, on prend conscience du rôle du sport comme vitrine d’un pays. VIDAL dit que « Le sport est devenu une affaire d’Etat ». Le sportif devient un ambassadeur des Nations.

v  L’opinion publique est pour la modernité. La presse sportive devient la plus importante en France (journal LOTTO). En 1920 : 120.000 exemplaires par jour contre 277.000 par jour en 1933. Les sports les plus populaires sont les sports équestres, le cyclisme, le foot, rugby boxe, natation et tennis.

v  Ce qui fait définitivement pencher la balance du côté des sportifs, ce sont les JO de 1924 attribués à Paris comme récompense de la guerre.

 

 

III.4) Les Instructions Officielles du 20 juin 1923 (L. Bérard)

 

Ces I.O. du 20 juin 1923, signées par Léon BERARD, sont un ensemble de textes qui constituent un plan général de rénovation et d’étude de l’école française, y compris l’EP. Ils sont en continuité avec les IO de 1887.

 

 

a)     A l’école primaire

 

BERARD souhaite « une école davantage accueillante », inondée d’air et de soleil.

« L’école n’est pas plus une salle de jeux qu’elle n’est une prison. L’école est l’école : une réunion d’enfants qui travaillent de bon cœur, à leur éducation commune sous la direction d’un maître ».

 

Tous les exercices militaires sont supprimés. Ces I.O. donnent une nouvelle conception de l’élève : on lui demande plus d’attention et de jugement.

 

 

On fait référence à J.J. ROUSSEAU par J. GOTTELAND qui traduit les IO de 1923 en définissant 5 grands principes pédagogiques en EP :

 

§     Caractère hygiénique : « L’EP se propose à l’école primaire un double but : le premier, corriger les attitudes défectueuses qu’impose au corps de l’enfant le travail scolaire ; le deuxième, développer les qualités physiques (force, adresse, agilité) »

 

§     Caractère obligatoire : les IO réaffirment l’obligation de l’EP. Aucun élève ne peut être dispensé sauf certificat médical à l’appui.

 

§     Caractère quotidien : les 2h hebdomadaires sont divisées en séquences. Le plus couramment : 20 mn le lundi, mercredi, vendredi ; 30 mn le mardi, jeudi.

 

§     L’équivalence disciplinaire : matière à part entière avec les mêmes caractéristiques :

-      préparation à l’écrit

-      déroulement de la leçon

 

   Intensité (FC)

 


1 = mise en train

2 = leçon proprement dite

3 = retour au calme

                                   1      2     3

Temps

 

§     Caractère éducatif : l’EP doit être éducative, utile. Plus on avance dans la scolarité, plus on a affaire à des exercices éducatifs et correctifs (marche, course, lancer… qui sont des gestes réalisés dans la vie de tous les jours).

L’objet de l’enseignement n’est pas d’embrasser tout ce qui est possible de savoir mais d’apprendre ce qu’il n’est pas permis d’ignorer (GREARD).

 

Tous ces principes visent une politique de lutte contre la dégénérescence de la race.

 

 

Les filles font de l’EP, mais différente de celle des garçons, car toutes les activités dites « dangereuses » pour les fonctions de procréation: « La femme est la cellule mère de l’Humanité ».

 

Les IO de 1923 sont bien accueillies car elles laissent l’initiative aux enseignants : c’est un choix de participer à un projet humaniste (préparer l’enfant à sa vie future et cultiver l’esprit de cet enfant ).

 

 

b)     Dans le secondaire (collège, lycée)

 

Dans le secondaire, on assiste aux même réformes menées par BERARD et HERRIOT.

L’arrêté du 19 janvier 1925 définit l’organisation de l’EP dans le secondaire.

 

On impose une demi-journée de plein air (pour garçons et filles) une fois par semaine, pour sortir de l’établissement. Les élèves y réclament des pratiques de jeux et de sports.

Donc les enseignants font de la gymnastique pendant les 2h d’EP.

 

Les IO sont interprétées de la façon voulue et cela donne des EP différentes. Les 3 groupes de pression (médecins, militaires, pédagogues) sont en conflit pour rédiger une synthèse qui donne lieu au règlement général de l’EP en 1925.

 

C’est l’école de Joinville qui bénéficie finalement de la rédaction du rapport, mais il y a décalage entre cette version et les attentes des profs et élèves. Cela crée un conflit qui occupe tout l’entre-deux-guerres. L’EP est en crise et à la recherche de son identité.

III.5) Le Règlement Général de l’EP de 1925 : La Méthode Française

 

L’école de Joinville met 7 ans pour rédiger son rapport (1925 à 1932) car elle a du mal à établir un compromis entre les différents acteurs. L’EP de la copie de Joinville n’est pas du tout une EP militaire.

 

Le 1er tome définit les bases physiologiques et pédagogiques de l’EP.

Tome 2 : traite des sports individuels, collectifs.

Tome 3 : éducation militaire et rééducation.

 

L’EP est éclectique à 2 niveaux :

1)     Elle développe santé, force, résistance, caractère, adresse et vertu morale.

2)     Dans les moyens et contenus : jeux traditionnels, assouplissements à effets correctifs, sports individuels à partir de 16 ans (athlé, natation, gym), sports co.

L’enjeu est de former un individu polyvalent, débrouillard, celui qui se sort de n’importe quelle situation (COUBERTIN et HEBERT).

 

La leçon doit être continue, alternée, graduée, attrayante, disciplinée. C’est une EP de base (pas de spécialisation).

 

 

III.6 ) Des militaires aux médecins

 

Il y a transfert du monopole de l’EP : la fin des années 20 et début des années 30 se caractérise par la fin du monopole des militaires au profit des médecins, car le contexte leur est plus favorable à la sortie de la guerre.

 

L’EP combat les fléaux (maladies) en les prévenant et en les soignant.

Après la Guerre, la France compte 1 bistrot pour 83 habitants. Le discours est : « au lieu d’aller au bistrot, allez au stade. » Les médecins sensibilisent le ministère de l’instruction publique et le convainquent des bienfaits de l’EP dans le redressement de la race.

 

En 1927, les médecins obtiennent le droit du MIP de former les enseignants d’EP. On crée donc des écoles pour former les profs : l’IREP ( Institut Régional d’EP). On leur inculque une EP médicale et scientifique.

 

·         Le 1er IREP est créé à Bordeaux en 1927, puis Paris, Lille, Nancy et Lyon, tous rattachés aux facultés de médecine. Pour la première fois, c’est une formation universitaire.

On trouve à la tête des IREP les plus influents médecins : Bordeaux (TISSIE), Lyon (LATARJET) et Paris (Dr CHALEY-BERT).

 

Des IREP sont créés à partir des différentes facultés de médecine en France, donc les profs sont de plus en plus compétents. Ils prennent les place des étudiants de l’école de Joinville.

Les médecins jouent un rôle de plus en plus important par l’intermédiaire des IREP, agissent sur les diplômes et font évoluer le CAEG de 1869.

En 1931, le CAEG devient CAEP (Certificat d’Aptitude à l’Enseignement de l’EP).

En 1933, le CAEP supérieur devient le CAPEP (Certificat d’Aptitude au professorat d’EP).

L’EP devient un terrain d’expérimentation pour les médecins.

Cela jette le discrédit sur l’EP : elle n’est pas seulement hygiénique.

 

 

IV Du Front Populaire à la IVème République (1936-1959)

 

En 1936, les hommes politiques prennent conscience du retard de l’EP ; Le Front Populaire tente de réhabiliter l’EP à l’école. C’est la période durant laquelle les hommes politiques ont choisi de rejeter le sport spectacle, pour ses effets «pervers» (argent, professionnalisme).

 

Le Front Populaire crée donc un autre modèle d’EP = le sport pour tous mis en œuvre pour la 1ère fois par des hommes politiques (cf. poly p.3).

Ils créent 2 sous-secrétaires d’Etat : P. DEZARNAULDS (médecin) et Léo LAGRANGE qui sont rattachés au ministère de la santé publique.

 

Un remaniement ministériel a lieu le 22 juin 1937 (crise financière) avec des conséquences sur l’EP. Le ministre CHAUTEMPS décide de poursuivre la politique de Léon BLUM et de fusionner les 2 sous-secrétaires d’Etat. Il confie cela à LAGRANGE.

 

Le ministère de la santé ne finance plus l’action du sous-secrétaire d’Etat. L’EP réintègre le ministère de l’Education Nationale. Dès que le Front Populaire a été constitué, la priorité est donnée à la question de l’EP et des loisirs, la volonté politique est très forte.

On se soucie du travail, mais on prépare aussi le repos du travailleur à l’école.

 

L'importance de l'école est telle que le 9 septembre 1936, le gouvernement décide de prolonger l'école obligatoire jusqu'à 14 ans.

Le but de cette manœuvre est de permettre d'apprendre un métier, à gérer son temps de repos et faire reculer le taux de chômage. C’est une politique de protection de l’enfance.

 

 

Loi du 5 avril 1937 :

L'Etat prend désormais en charge la responsabilité de l'enseignant : il est donc couvert dans l’exercice de ses fonctions (sorte d’immunité). Il y aujourd'hui une tentative de retour en arrière. Le Front Populaire est une période clé dans l'intégration de l'EP à l'école.

 

 

IV.1) Le plan DEZARNAULDS

 

Plan élaboré par le sous secrétaire d'Etat à l'EP. Expérimenté dans 3 départements au début (avec succès), il sera ensuite repris par le Front Populaire.

Ce plan réclame un contrôle médical systématique, que tous les clubs subventionnés par l’Etat créent une section d’EP et 5h d’EP à l’école par semaine dont 3h en plein air.

 

Il s'agit d'inscrire l'EP comme discipline d'enseignement à part entière. L'enseignant a 3 heures de plein air, libre à lui de faire du sport ou des loisirs dirigés (culturel = visites de musée, usines…). L'EP profite de cette ouverture de l'école sur la vie.

Loi du 22 mai 1937: Le Front Populaire ordonne que ces 3 heures de plein air soient inscrites dans toutes les écoles du primaire et secondaire. L'initiative est laissée au chef d'établissement pour la demi-journée de plein air. Elle peut donc être confiée aux professeurs d’EPS.

 

La conséquence en EP est l'élaboration de nouvelles IO en septembre 1938 = l'EP passe de 2 à 5 h, au détriment d’autres matières. L'enseignant peut désormais enseigner du sport.

 

Le plan DEZARNAULDS symbolise une augmentation des horaires. Mais il doit faire face à la crise économique (problème d’argent pour financer les 3h supplémentaires). Le budget de l’EP est en augmentation

 

 

IV.2) Le Brevet Sportif Populaire (BSP)

 

C'est la grande mesure de Léo LAGRANGE, père fondateur du BSP. Il souhaite à travers ce diplôme que le peuple français entretienne sa santé grâce à une culture physique.

Il est contre le sport-spectacle et contre la Coupe du Monde de football en France en 1938. Le Front Populaire refuse donc la construction d’un grand stade pour la Coupe du Monde.

La 1e cession du BSP a lieu le 22 mai 1937.

 

Le Front Populaire est influencé par plusieurs initiatives :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le BSP comporte 5 épreuves sportives:

Pour les hommes:                                                     Pour les femmes :

¨   Lancer du poids                                                    - Lancer du poids

¨   Saut en hauteur avec élan                                     - Saut en hauteur

¨   100m plat                                                              - 60m

¨   grimper de corde (uniquement bras)                    - Grimper de corde (bras et pieds)

¨   1000m                                                                

¨   Natation (épreuve facultative pour les 2 sexes car pas

assez de piscines en France)

Ces épreuves sont organisées par les fédérations sportives avec des barèmes en fonction de l'âge des participants.

1.     L'enfance (12 - 14 ans)

2.     La jeunesse (15 - 17 ans)

3.     L'adolescence (18 - 34 ans)

4.     La maturité (+ 35 ans)

 

Le BSP doit être repassé chaque année. Il sert à mesurer l'état physique des français, mais il n’est pas obligatoire.

 

Entre mai et décembre 1937, 380.000 sur 450.000 candidats obtiennent le BSP.

Cela intéresse l’armée et l’école (ces 2 institutions revendiquent l’utilité de l’EP).

 

En 1938, LAGRANGE impose le BSP au certificat d'études. Cela conforte l'intégration de l'EP à l'école. On demande même qu’il entre au bac et aux concours administratifs mais ce sera refusé.

 

 

IV.3) Bilan du Front Populaire

 

Incontestablement, le Front Populaire a contribué à l'intégration de l'EP à l'école :

-        par la création du BSP

-        par l'augmentation des horaires

-        par l’imposition de l’EP comme épreuve dans un examen scolaire

 

Mais l'action du Front Populaire a été encore plus importante pour l’EP en dehors de l'école. Les français et françaises découvrent les bienfaits de la culture physique (auberges de jeunesse, voyages…).

 

Sous le Front Populaire, s’organise le sport scolaire : l’OSSU (Office du Sport Scolaire Universitaire).

 

Pour les hommes politiques du Front Populaire, le bilan est mitigé. Concrètement, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir (J. ZAY). Il explique les raisons des "échecs" par la crise financière mondiale qui touche la France à ce moment-là et le manque de temps.

Le Front Populaire a préparé les réformes de Vichy (et non l'Etat de Vichy).

 

 

IV.4) La politique de Vichy

 

En mai 1940, les Allemands traversent la ligne Maginot et sont à Paris en juin. PETAIN est ensuite appelé et forme son gouvernement de Vichy. DE GAULLE part à Londres. Le 22 juin 1940, Pétain signe l’armistice qui coupe la France en 2 parties.

 

Les députés français donnent les pleins pouvoirs à Pétain : « Travail, famille, patrie ».

Tout le régime politique est au service d’un homme. Pour PETAIN, dans les années d’avant-guerre, « l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’esprit de sacrifice », ce qui explique la défaite. L’homme nouveau doit être au service du chef de la Nation (Pétain).

P. LAVAL doit élaborer la doctrine nationale de Vichy, constituée de cinq points :

Ø   Condamner la culture livresque. (Pétain : l’instituteur est responsable de la défaite)

Ø   La construction de l’homme nouveau doit se faire à partir de l’action. Pour BERGSON, « vivre constitue à agir »

Ø   Abolir les conflits des classes. Tout individu doit donner sa vie au maréchal.

Ø   Supprimer le bolchevisme (chasse aux cocos)

Ø   Agir prioritairement sur les jeunes avec le travail

 

J.P. AZEMAR dit que Pétain veut « bâtir une France saine, disciplinée et solidaire ».

Pétain veut reprendre en main les jeunes en France avec, en 1940, la création de chantiers de jeunesse obligatoires. Ce sont des structures d'accueil où l'on récupère la classe de 1920, pour leur inculquer l'EGS et en faire de bons citoyens au service de Pétain.   

 

Le 7 août 1940, création d’un Commissariat d’Education Générale et Sportive (CEGS) confié à Jean BOROTRA. Il a pour mission de reconstruire la jeunesse Française.

La charte des sports du 20 décembre 1940 provoque le début du contrôle de l’Etat dans l’organisation du sport. Pour être subventionnés, tous les clubs doivent mettre en œuvre la politique de Pétain. C’est une atteinte à la loi de 1901.

 

Les IO du 1er juin 1941 définissent ce que doit être l’EP à l’école :

L’EP ne s’appelle plus EP mais EGS (Education Générale et Sportive). L’EGS contribue au haut niveau. C’est une éducation physique, morale et naturelle (éclectique).

Le devise de ces IO est : « Etre fort pour mieux servir » (le maréchal).

 

 

L’EGS comporte 7 domaines :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


L’EP est le massif central d’activité, les autres disciplines sont les contreforts de l’EP.

J. CARCOPINO laisse carte blanche à BOROTRA pour introduire l’EGS à l’école et redresser la jeunesse de la France : c’est une éducation eugénique (pour un développement de la race et la transformation de la jeunesse).

 

Le projet est de mettre 7h d’EGS en primaire et 7h30 en secondaire, mais Vichy retient finalement 5h en primaire et 5h30 en secondaire.

La demi-journée de plein air est maintenue sous Pétain (marche, secourisme, sports).

 

Le 6 juillet 1942, Pétain crée une filière courte (formation des profs de gym en 6 mois). Ce sera le maître d’EP. Leur formation se fait en CREGS (Centres régionaux d’EGS).

Les IREPS aboutissent au CAPEPS (créé en 1943) qui permet d’enseigner dans les lycées. Les CREGS « bouchent les trous ». Il y a donc présence de 2 statuts. En quelques mois, le nombre d’enseignants est multiplié par 4.

 

Le BSP est remplacé par le Brevet Sportif National (BSN). Une épreuve d’EPS s’appuyant sur le BSN et facultative est mise en place au bac, durant l’année scolaire 1941 / 1942. Cette année, 50% de ceux qui passent le bac ont choisi cette épreuve. Elle répond donc aux besoins de la jeunesse.

 

Cette épreuve sera obligatoire en 1952, soit 80 ans après le texte de 1869.

 

 

IV.5) La libération et les Instructions Officielles de 1945

 

La IV° République n’a pas comme priorité l’organisation de l’EP. C’est une période instable, de rupture politique et sociale. DE GAULLE veut prendre les pleins pouvoirs. La France tente de se reconstruire en pleine crise. Ceux qui arrivent au pouvoir à la Libération sont contre les lois de Pétain et l’EGS.

 

Le 18 août 1945, la Direction Générale d’Education Physique et Sportive (DGEPS) est créée, rattachée au Ministère de l’Education Nationale.

 

A sa tête, J. SARRAILH (ancien membre du cabinet de LAGRANGE) qui reconduit les idées du Front Populaire. On trouve aussi G. ROUX, M. EYQUEM, E. MERCIER et      M. BAQUET, directeur technique de l’INS (Institut National des Sports).

Cette DGEPS rédige les nouvelles Instructions Officielles de 1945.

 

Ce texte illustre l’influence de la méthode sportive.

Dans le préambule, on présente la rupture avec la politique de Vichy (EPS au lieu d’EGS). L’EP ne peut se résumer à l’enseignement d’une seule méthode. L’enseignant a le choix entre 3 méthodes d’enseignement : sportive, naturelle, éclectique (Joinville).

 

Ce texte est qualifié d’éclectisme ouvert. On instaure en EP une multiplicité, mais aussi un émiettement (danger). L’EP a un triple but :

1)     Rechercher les attitudes correctes (Tiens-toi droit)

2)     Développer le geste naturel (vitesse, adresse, résistance, force : VARF).

3)     Apprendre des techniques individuelles et collectives (éducation morale).

La leçon doit être écrite et un livret d’EPS fourni à chaque élève avec ses performances.

 

L’EP doit tenir compte des caractéristiques des élèves, classés en 4 groupes d’aptitude. Seul le groupe 1 peut tout faire y compris le sport scolaire. Le groupe 4 ne relève pas de l’EP Normale. C’est le médecin qui détermine les groupes à partir de tests.

 

Le Dr COLL DE CARRERA veut reprendre les initiatives de Vichy. La logique d’eugénisme est la science des techniques qui travaillent à l’évolution de la race. L’EP de la Libération doit faire face à une crise matérielle.

 

M. AMAR dans « Nés pour courir » dresse un bilan des installations de la IV° République.

La situation est catastrophique : 1 prof d’EPS pour 3000 élèves. En 1953, 52 départements n’ont pas de piscine correcte au niveau hygiénique ; 8 départements n’en ont pas du tout. . 60 % des élèves du secondaire n’ont pas de prof.

 

Le SNEP (Syndicat National d’Education Physique) est créé officiellement à la Libération. Ce syndicat prend un pouvoir important. Les CREG sont remplacés par les CREPS. La formation CAPEPS passe à 4 ans.

 

 

IV.6) La chute de la IV° République et les IO de 1959

 

En décembre 1958, la Nouvelle Assemblée élit DE GAULLE président (DEBRE est 1er Ministre). C’est la dernière fois que l’Assemblée élit le président la République. En 1962, ce sont les citoyens qui votent. La V° République est promulguée le 1er octobre 1959.

 

Au Ministère du sport est créé un haut commissariat à la jeunesse et aux sports, en remplacement de la DGEPS, avec M.HERZOG à sa tête, promoteur d’un statut sportif sur le plan international qui illustre la volonté de DE GAULLE de donner au sport toute son importance.

 

Au début des années 60, il y a une entrée massive des élèves au collège (effets du baby-boom). Le gouvernement prolonge la scolarité obligatoire de 14 à 16 ans par la réforme BERTHOIN le 6 janvier 1959. Il y a donc 2 ans de plus d’EP à l’école.

 

HERZOG doit faire face à 2 éléments :

-        l’extrême diversité des pratiques d’EP qui a accompagné les IO de 1945

-        la publication des travaux de P. SEURIN, chef de file du courant suédois en France, qui dresse un répertoire des principales méthodes afin d’en tirer une synthèse.

 

Les IO du 20 juin 1959 sont la conséquence de ces 2 éléments. On peut les considérer comme une reprise en main des enseignements face à cette diversité, où il s’agit de redonner un minimum d’unité, comme l’éclectisme de SEURIN qui préconise une EP traditionnelle, un éclectisme fermé.

Désormais, l’initiation aux sports entre dans la leçon : chaque leçon doit contribuer aux différents aspects du développement dans un temps réduit.

 

 

HERZOG nomme une commission et sollicite l’inspection générale en EPS ( L. HAURE-PLACE, R. MARCHAND et P. SEURIN ) qui rédige les IO ; HERZOG n’est pas vraiment satisfait sur le contenu de l’EP, mais accepte un compromis.

 

Le 29 août 1959, HERZOG impose l’EPS comme épreuve obligatoire au bac. Cela montre l’importance de la discipline au sein de l’école. On y trouve de la gym, grimper de corde, athlé, natation (apparition de la trilogie athlé-gym-natation comme sports de base). 80 à 90 % des élèves ont la moyenne. Seuls les points supérieurs à 10 comptent.

 

Il manque un outil pour transformer les notes ; en 1957, la table LETESSIER est créée qui impose un même barème pour tous.

 

Les IO de 1959 constituent une transition avant celles de 1962 et 1967 car elles rappellent les principes de 1945 et amorcent l’intégration du sport dans l’EP.

 

 

V La sportivisation de l’EP (1960-1970)

 

1960 est l’année de la révolution culturelle. L’esprit moderne s’oppose au traditionnel. Les années 60 sont l’apogée des 30 glorieuses (45-75) avec une forte consommation.

Le PIB croit de 5,5 % par an et l’hygiène s’améliore.

 

Les Français découvrent la sécurité et la santé, qui devient un bien de consommation. On passe d’un corps qui souffre à un corps qui ressemble. La jeunesse française découvre d’autres pratiques sportives (glisse, sports californiens) : contre-culture sportive qui dégage des valeurs de convivialité, fraternité, pacifiques (mouvement hippie).

 

Les mentalités françaises ont pour principale préoccupation le principe de liberté de l’individu (il est interdit d’interdire). « Travail, famille, pilule » est le slogan des mouvements féministes. On recherche un plaisir immédiat, un bonheur constant.

Est-ce que les sports s’appuient sur cette révolution culturelle ?

 

 

V.1) Les raisons de la rupture

 

Au début des années 60, HERZOG crée 3 commissions, afin de réformer les IO de 59 :

-        Une commission A qui réfléchit sur le but et l’utilité de l’EP

-        Une commission B qui réfléchit sur les besoins des enfants expliqués par les données biologiques et psychologiques

-        Une commission C qui réfléchit sur l’enfant en tant que citoyen appartenant à un groupe (question de l’intégration et socialisation).

 

La commission B rédige son rapport en janvier 1961 sous l’influence du médecin J. LE BOULCH. Mais HERZOG arrête les travaux de cette commission car aux JO de Rome en 1960, les Français ne ramènent aucun titre olympique et leurs résultats sont très éloignés de ce qui était escompté. La France s’estime ridiculisée aux yeux du monde, car le sport montre qu’elle est une Nation en retard. DE GAULLE vise à reconstruire l’image de la France. Il charge HERZOG d’accélérer la rénovation du sport et de l’EP en France.

Cet échec sportif révolutionne l’EP. Les médias s’emparent de cet échec (presse écrite, TV). Des journaux œuvrent pour que le sport intègre l’école, car le prof d’EPS est à l’origine de la débâcle : L’équipe (J. GODDET), Le Figaro, Le Monde (R. MARCILLAC).

 

A partir de 1952 (JO Helsinki), les pays de l’Est, dirigés par l’URSS participent au JO. Le terrain de sport devient alors un lieu d’affrontement, dans le cadre de la guerre froide. A travers les résultats sportifs, c’est le pouvoir de la Nation qui est montré.

 

 

V.2) Les volontés politiques

 

HERZOG estime que le manque d’installations est à l’origine des résultats de Rome. Il pense qu’on ne peut promouvoir le sport sans équipement.

 

1ère initiative :

Il fait voter 3 lois-programmes quinquennales :

-      La 1ère loi-programme de 61-65 prévoit la construction de 1250 stades, 500 terrains de volley et basket, 1000 gymnases COSEC, 125 piscines. L’Etat demande aux communes de financer ces installations (pour 30%) et l’accès gratuit aux gymnases.

-      La 2ème loi-programme de 66-70 prévoit la construction de 2850 stades, 1500 gymnases et 710 piscines.

-      La 3ème loi-programme de 71-75.

 

2ème initiative :

En 1961, c’est la transformation de la ½ journée de plein air en ½ journée de sport, ordonnée par HERZOG par les I.O. du 21 août 1962. L’enseignant fait aussi du sport pendant les 2h d’EP et l’EP devient alors naturellement sportive, pour préparer le succès aux compétitions. On prépare l’obtention des BE et BF ;  on organise des compétitions.

 

HERZOG et BOROTRA publient en 1965 « Essai de doctrine du sport ». L’idée est de donner la priorité au sport. « Il est grand temps de repenser le sport si on veut qu’il ne soit pas dénaturé par des exploitations abusives. Il faut le repenser dans son organisation mais bien plus encore sur ses finalités. »

 

HERZOG veut préserver les générations futures. Il développe l’idée (émanant de la FSGT) d’un sport éducatif au service de l’homme, de l’enfant et accepte la pratique féminine. On parle aussi d’un sport-loisir : sport pour tous.. Le sport est une activité libre et accessoire.

 

En 1966, le Ministère de la Jeunesse et des Sports est créé par DE GAULLE. L’EP quitte l’Education Nationale. F. MISSOFFE est nommé à sa tête et prône une politique sportive de haut niveau («  La performance avant tout »), avis accueilli favorablement par l’opinion publique. Les sections sport-étude sont créées (ex d’un lycée climatique à Villards-de-Lans en vue des JO d’été à Mexico en 68).

 

Le journal « France Demain » (MJS) dit : « L’enseignant d’EPS doit former des champions. » Il devient le prof de sport chargé de détection, entraînement, sélection. C’est le mythe du champion avec KILLY, TABARLY et JAZY. Mais certains profs tiennent compté malgré tout du discours d’HERZOG.

En 68, les Français manifestent un certain intérêt pour le sport à la radio et à la télé, souhaitent que leurs enfants en fassent mais ne sont pourtant pas nombreux à participer.

 

 

 V.3) Réactions et nouveaux projets

 

En 1964-65, la réaction s’exprime par 2 courants qui s’opposent :

 

1)  Les traditionalistes, avec P.SEURIN à leur tête, pour une intégration limitée du sport. Il cherche à promouvoir la gymnastique volontaire : FFEPGV ( Fédération Française d’Education Physique Gymnique et Volontaire)

 

2)  Les modernistes, avec LE BOULCH, pour une conception psychocinétique de l’EP. Il s’oppose aux sports comme moyen fondamental d’EP car, selon lui, le sport est une activité qui a sa fin en soi alors que l’EP a pour but le développement des qualités motrices.

 

MISSOFFE nomme une Commission qui rédige des IO en 1967 pour adapter les travaux de 62 à l’ensemble de l’EP.

 

 

V.4) Les Instructions Officielles du 19 octobre 1967

 

La survie de l’EP passe par un compromis des rapports de force. Les IO sont donc éclectiques. On retrouve l’expression d’une démocratie en EP. On parle de concepts d’APS (différents du sport de l’EPS). Ces IO dureront 18 ans.

 

Ils poursuivent 3 objectifs :

1)     Contribuer à la santé positive, c’est-à-dire la capacité pour un individu de s’accoutumer à l’effort et se dépasser.

2)     Contribuer à la formation de la personnalité, en visant l’épanouissement physique, intellectuel et moral

3)     Etre l’écho de l’importance croissante du sport. Le sport appartient à la culture, et l’école est le reflet de la culture.

 

La sportivisation de l’EP est réelle. En 1967, J.TEISSIE influence réussit à convaincre MISSOFFE de l’utilité de l’EP.

Au travers de ces IO, on voit un triple enjeu de l’EP  pour les élèves :

 

1)  Maîtrise du milieu. On leur inculque des valeurs (goût de l’effort, du dépassement de soi et ambition de s’imposer). L’élève doit savoir ajuster son comportement psycho-moteur à l’environnement matériel. Pour cela, les sports de base (athlé, natation) semblent plus propices.

 

2)  Maîtrise du corps. Les élèves prennent conscience de leur corps, de la dissociation segmentaire et il faut pallier les insuffisances morphologiques et fonctionnelles. Toutes les formes de gym et les activités d’expression (danse, mime) contribuent à ce but.

 

3)  Maîtrise de soi, développer les qualités psychologiques, la gestion des relations à autrui. Cela se passe dans les sports co et de combat (sauf pour les filles). L’EP contribue à l’auto-discipline, à la faculté de se prendre en charge, de respecter des lois (citoyenneté).

 

Cf. polycop « Programme du 3 mai 1967 ».

ATTENTION, A NE PAS CONFONDRE AVEC LES IO DU 19 OCTOBRE 1967.

Ce programme découpe l’EP en fonction de la scolarité. Un enseignant poursuit 3 buts :

-        développement de fonctions organiques et foncières (santé)

-        agir sur les facteurs physiologiques et psychologiques de la conduite motrice

-        éducation des aspects psychologiques et sociaux des conduites motrices

 

C’est un modèle de programmation stricte qui laisse peu de liberté aux enseignants et disparaît vite car le découpage proposé ne correspond pas à l’évolution culturelle de 1968. Cette programmation illustre la volonté de construire une rationalité en EP. La crise des installations sportives accélère le processus.

 

En EP, le discours dans les années 60 est que l’élève est au centre du système éducatif. L’EP est enseignée selon les caractéristiques des élèves.

 

 

V.5) Le temps des critiques

 

1967 ouvre le temps des critiques. En mai 68, l’opinion publique a su prendre la parole. C’est une révolution républicaine noble (non sanglante).

En EP, les mouvements contestataires s’opposent au discours officiel ; on distingue 2 tendances :

 

1)     Le courant scientifique : on prétend que l’EP est une science. J. LE BOULCH (et la psychocinétique) s’appuie sur les travaux des constructivistes du point de vue de l’apprentissage (PARLEBAS). Celui-ci dénonce l’hégémonie de la technique dans « EP : polypier de technique ». Revue EPS n°85-88, 1967. L’EP est en miettes.

 

2)  Le courant humaniste : l’individu est au centre de l’EP. Certains auteurs parlent même d’une éducation corporelle (pour une réalisation de la personnalité) au lieu d’EP. Les sciences humaines deviennent la référence à propos de l’utilité de l’EP. BROHM transfère les analyses de Freud et les travaux sociologiques en EP, condamne le caractère violent du sport, qui aboutit à l’aliénation des individus, dénonce les abus du sport, dans la revue « Partisan en 1968 : sport, culture et répression ».

 

C. PUJADE RENAUD : L’EP est sportive et n’est pas du service de l’épanouissement physique : c’est une éducation physique et artistique. Elle réclame une EP qui contribue à l’émancipation du corps (éducation corporelle).

GREC : groupe de recherche en expression corporelle.

 

 

 

 

V.6) Les contradictions des années 1970

 

L’Etat maintient le choix d’une EP et sportive, qui séduit les profs. Le successeur de MISSOFFE, J. COMITI, secrétaire d’Etat, décide une série de mesures réduisant les horaires de l’EP : 3h hebdomadaires dans le 1er cycle ; 2h dans le 2nd cycle.

 

Sa circulaire du 7 septembre 1972 supprime les heures d’AS pour les mettre en dehors du temps scolaire : le prof de gym a donc un déficit d’horaire, il faut redistribuer les profs (moins de recrutement). Les CAS (centres d’animation sportive) sont créées pour les élèves voulant faire du sport (hors temps scolaire). Mais les profs d’EPS refusent d’encadrer les CAS. Il naît un conflit entre l’Etat et les profs de gym concernant l’EP.

 

La loi MAZEAUD de 1975 a pour but de faire de l’enseignement du sport une priorité nationale. Elle en fait un service et est à l’origine de la création des INSEP (centres de formation des enseignants d’EP), mais les profs veulent que ce soit le MEN qui les forme.

 

Conséquences de la loi MAZEAUD :

Création d’un nouveau concept de sciences et techniques (STAPS) et du DEUG STAPS (diplôme universitaire) en 1975. La formation est alors assurée par le MEN et non plus par celui de Jeunesse et Sports. En 77, apparition de la licence STAPS.

 

Conclusion sur la loi MAZEAUD :

Elle est à la fois une menace et une avancée considérable (apparition d’un cursus universitaire STAPS.) Mais le choix des contenus est porté sur l’éducation sportive. On parle désormais d’EPS.

 

 

VI Les années 1980 et l’échec scolaire

 

VI.1) Le retour de la gauche au pouvoir

 

L’arrivée au pouvoir de la gauche en 1981 amplifie la démocratisation de l’école. L’Education redevient une priorité Nationale. L’échec scolaire doit être combattu et avec lui toutes les inégalités.

 

JOURNET présente 3 indicateurs de l’échec scolaire :

v    Le redoublement : en 5°, plus d’un élève sur 2 a au moins un an de retard.

v    L’orientation : la moitié d’une classe d’âge est écartée de l’enseignement long.

v    Abandons : 13% des collégiens n’ont ni le brevet, ni les 1ers diplômes professionnels.

 

A partir de 1981, plusieurs travaux dénoncent l’ampleur de l’échec scolaire. Au niveau des réformes institutionnelles, on distingue 4 étapes d’un processus de rénovation de l’école.

 

 

1)     La rénovation des collèges

 

Les socialistes lancent une multitude de réflexions et de recherches. Le rapport LEGRAND propose 4 solutions : supprimer la sélection précoce, lutter contre l’échec par des transformations institutionnelles, développer les capacités d’autonomie et de responsabilité et adapter le collège aux exigences sociales nouvelles.

 

Cette politique de rénovation s’articule autour de 3 axes :

-        une pédagogie de projet (pour le prof) et du projet (contrat pour l’élève).

-        une création d’un espace social spécifique (foyers socio-éducatifs : FSE)

-        une décentralisation de l’espace éducatif

 

Le Ministre de l’EN, A.SAVARY, tente de mettre en place les solutions du rapport LEGRAND. Il crée les ZEP (Zones d’Education Prioritaire) en 1981, les Zones Sensibles en 1992 et les REP (Réseau d’Education Prioritaire) en 1999. La notion de Projet d’Action Educative (PAE) est institutionnalisé.

 

Les années 80 (surtout à partir de 1986) sont donc le temps de la rénovation.

CHEVENEMENT reprendra cette politique de la rénovation et sera à l’origine de nouvelles Instructions pour les collèges en 1985, y compris en EP.

 

 

2)     La loi d’orientation sur l’éducation de JOSPIN de 1989

 

Cette loi constitue une nouvelle charte du système éducatif français. « Le service public contribue à l’égalité des chances. Les enseignements artistiques ainsi que l’EPS concourent directement à la formation de tous les élèves ». Pourquoi le précise-t-on, sinon pour entendre que l’EPS n’est pas encore une discipline d’enseignement à part entière.

 

Il s’agit de mieux former élèves et profs, d’associer à des volontés socio-économiques une volonté systématique de transformer les cadres pédagogiques traditionnels d’exercice.

 

 

3)     La rénovation des lycées

 

A.PROST avait anticipé l’hétérogénéité des élèves en lycée en 1983. La croissance des effectifs du lycée ne fait qu’accélérer cette réflexion. La rénovation des lycées s’appuie sur 2 principes fondamentaux :

-        mise en place d’une pédagogie de la réussite ( procédures d’aide et de soutien)

-        suppression des filières (ABCDE) pour rompre avec une hiérarchie symbolique (définition de 5 nouvelles voies : S, L, ES, STT, STI). Apparition des bacs pro, le BEP devient un diplôme intermédiaire et le CAP disparaît progressivement.

 

 

4)     La réforme des collèges de F.BAYROU

 

En mai 1994, F. BAYROU présente 155 propositions pour définir un « nouveau contrat pour l’école ». Ces mesures n’ont qu’un but, accroître l’efficacité du système éducatif dans la lutte contre l’échec. Elles s’articulent autour de 4 grands axes :

 

1)     Identifier et informer des missions de l’école : enseignements fondamentaux obligatoires pour le primaire et le collège ; enseignements diversifiés en lycée

 

2)     Lutter contre les inégalités sociales, culturelles : l’accent porte sur la langue française, l’éducation civique et l’EPS qui obtient une 4ème heure en 6°.

 

3)     Faire confiance au terrain et à l’expérience (décentralisation) : Le chef d’établissement devient encore plus responsable de la politique éducative.

 

4)     L’avenir au présent : préparation de l’orientation et de l’insertion professionnelle

 

En 1998, les élèves descendent dans la rue pour réclamer des moyens (matériels, humains). Mais le MEN ne semble pas débloquer des crédits pour mettre en pratique cette réforme.

 

 

En résumé

 

L’organisation de l’école (et l’EPS) de 1980 à nos jours s’articule autour de la démocratie locale. L’Etat délègue ses pouvoirs aux collectivités territoriales. A la notion d’établissement public, on substitue la notion « d’Etablissement Public Local d’Enseignement » (EPLE) placé sous la tutelle des collectivités territoriales (lycée = région, collège = département, école primaire = mairie).

 

L’établissement scolaire pour poursuivre sa mission d’éducation doit désormais s’ouvrir sur l’extérieur. Le chef d’établissement ne travaille plus essentiellement dans une structure verticale, mais aujourd’hui, une structure horizontale s’est greffée à la première, où le chef d’établissement fait appel à des partenaires sociaux de même rang.

 

R. REMOND : « On peut se demander si en mettant dans des conditions identiques des enfants dont les dispositions ne le sont pas, le système n’aura pas pour effet d’accroître les inégalités de fait ».

 

 

Le bilan de la démocratisation de l’école (et donc de l’EPS) est donc contrasté :

OUI, la démocratisation est un succès : plus d’élèves ont accès à plus de savoirs.

NON, la démocratisation est un échec : l’égalité des chances ne se solde pas dans l’égalité des résultats. Le système éducatif sélectionne donc toujours des élites, d’une façon différente et différée (aujourd’hui en université). Les exclus sont désormais pourvus de diplômes universitaires non reconnus dans le monde du travail.

 

 

VI.2) La réintégration de l’EP au MEN et la pédagogie du « Canada-Dry »

 

Avec l’arrivée de la gauche au pouvoir, les profs d’EPS intègrent le MEN et quittent le Ministère de la Jeunesse et des Sports. La tendance Sport de Haut Niveau recule au profit de la tendance du sport éducatif et du sport pour tous.

 

Le prof d’EPS n’est plus assimilé à un entraîneur. Désormais l’EP ne se confond plus avec le sport. Dans les années 80-90, l’EPS semble retrouver en partie sa véritable identité.

En 1982, le SNEP dit : « il s’agit d’établir de nouveaux rapports au réel et aux savoirs pour tous les élèves, afin que l’enseignement par l’interaction de disciplines rénovées réponde effectivement à l’objectif de lutte contre l’Echec scolaire ».

 

Sur le plan positif, l’EP gagne en légitimité scolaire et sociale. Sur le plan négatif, cette reconnaissance institutionnelle a un prix, celui de l’homomorphisme, d’une discipline conforme aux autres. Mais qu’en est-il de sa spécificité ?

 

Les IO de 1985 (collège) et 1986 (lycée) et leurs additifs (1987-1988) répondent en partie à cette question. « L’EPS ne se confond pas avec les activités physiques qu’elle propose et organise ». Les IO de 1985 sont le fruit d’une commission dirigée par A.HEBRARD.

 

La didactique et la réflexion pédagogique ont permis des avancées considérables, l’EPS poursuit cependant toujours les mêmes finalités : apprendre à agir, à maîtriser ses émotions, à se dépasser ; santé…

Cependant, les IO de 1985-1986 se heurtent à un problème de contenus. La solution proposée officiellement est celle du PROJET, car l’enjeu est de doter l’EPS d’un programme national, d’un référentiel commun.

 

Les années 1990 seront donc marquées par ces débats entre les partisans d’un programme strict et ceux d’un référentiel national évolutif où l’interprétation est encore importante.

Il s’agit dévaluer des compétences à condition que celles-ci aient été enseignées, ce qui n’est pas toujours le cas.

 

A propos des programmes de 6° (1996), de 5°- 4° (1997), de 3° (1998) et de 2nde (1999), P. BOURDIEU et F.GROS disent : « Le programme n’a rien d’un code impératif. Il doit fonctionner comme un guide pour le professeur et les élèves qui doivent y trouver un exposé clair des objectifs et des exigences du niveau d’enseignement considéré ».

 

Aujourd’hui, l’appropriation de savoirs (compétences) en EP(S) est une nécessité dans le processus de l’intégration scolaire pour 2 raisons :

1.     Le savoir est la garantie que l’EP participe à la formation de l’individu.

2.     Le savoir confère à celui qui le détient une autonomie et donc une responsabilité.

 

 

En guise de conclusion

 

L’EPS est une discipline en crise d’identité. Si dans les intentions, l’analyse historique permet de répondre qu’il se produit effectivement une démocratisation de droit de l’école et donc de l’EPS malgré de très nombreux obstacles, dans les faits, la démocratisation n’est pas toujours synonyme de succès.

 

La conséquence principale de la démocratisation de l’école reste encore l’apparition de la notion  d'orientation. Même si 80% d’une classe d’âge décroche le niveau bac (seulement 65% l’obtiennent), celui-ci n’offre plus les mêmes garanties que jadis.

A.    PROST (1992) : « c’est dans la classe que se joue l’essentiel, seuls ceux qui y sont peuvent trouver des solutions aux difficultés actuelles ».

 

Source : Ufraps.net